Arrivée en Europe depuis maintenant quelques années, la tendance de la « slow fashion » fait de plus en plus parler d’elle en sol québécois. Mais que veut réellement dire « slow fashion »?
Par définition, la « slow fashion » s’oppose à la « fast fashion ». C’est un mouvement qui a été créé en réaction aux multiples changements dans l’industrie de la mode. Nous sommes passés d’un calendrier de deux collections par année, automne-hiver et printemps-été, à des chaines de magasins comme H&M et Zara qui sortent des nouveautés aux deux semaines. Il est plus facile que jamais de se procurer les dernières tendances à un coût dérisoire. Ce qui résulte en une surconsommation qui ne vient pas sans frais et qui aura un impact sur l’environnement et sur les conditions de travail des employés de la chaîne de production.
C’est de cet univers chaotique de la « fast fashion » qu’est né ce nouveau courant : la « slow fashion ». Celui-ci nous incite à ralentir la cadence, à réfléchir sur ce qui est devenu la norme et à proposer des options plus respectueuses à tous les niveaux de l’écosystème. La « slow fashion » invite à repenser un système de valeurs et de fonctionnement qui existe depuis des années. Elle cherche à reconstruire cette vision que nous avons de la mode et à poser des gestes concrets pour favoriser un retour du balancier.
Crédit : Anuschka Rees
Afin que la « slow fashion » ne se transforme pas, elle aussi, en mode éphémère, et pour lui assurer une pérennité en tant que modèle de développement durable, une équipe de recherche du « Master’s in Strategic Leadership towards Sustainability » en Suède a mis au point une liste de dix valeurs qui serviront de guide dans chacune des étapes de la chaîne de production. Ce guide peut être utilisé autant par l’entreprise qui souhaite se tourner vers ce modèle d’affaires que par le consommateur conscient de ses choix et cherchant à consommer mieux.
Les 10 valeurs de la « slow fashion »
1. Avoir une vision globale
Il peut être difficile pour les manufacturiers axés sur le profit de voir l’impact global de leur production. De même qu’il peut être difficile pour un consommateur d’imaginer les répercussions environnementales derrière l’achat d’un t-shirt à 5 $. C’est donc ce que le mouvement de la « slow fashion » encourage, l’adoption d’une approche qui tient compte de l’écosystème global et qui aide les acteurs à reconnaître comment leurs choix peuvent avoir des conséquences sur l’environnement et les gens. À ce sujet, le documentaire The True Cost s’avère très intéressant.
2. Ralentir la consommation
Cela passe bien entendu par la diminution des quantités que nous achetons, mais également par la qualité de ce que nous achetons. En consommant mieux et de manière plus réfléchie nous réduisons le risque que nos derniers achats finissent rapidement aux oubliettes dans le fond de notre garde-robe. Agir concrètement sur notre surconsommation a un impact direct sur la surproduction et sur l’environnement.
Crédit : Rose de Mai
3. Promouvoir la diversité
Il existe de plus en plus d’entreprises diverses et innovantes. Il est important d’encourager le travail des designers indépendants et des grandes maisons de mode, mais aussi l’industrie de l’usagé et du recyclé, etc. Tous les acteurs sont invités à prendre part au mouvement à leur manière.
4. Respecter les personnes
Exiger des entreprises l’établissement d’un code de conduite et d’une charte éthique permet de s’assurer que les travailleurs sont bien traités. De plus en plus d’entreprises ferventes de la « slow fashion » s’impliquent également dans leur communauté et visent une influence sociale forte.
5. Combler les besoins humains
Le designer peut répondre aux besoins des consommateurs en offrant des morceaux porteurs d’une signification émotionnelle. En racontant l’histoire derrière une pièce ou en invitant le consommateur à prendre part au processus de création, les besoins de créativité, d’identité et de participation peuvent être satisfaits. De bons exemples de ce principe seraient celui de AllCovered Fashion et de Rose de Mai, qui offrent un service de sur-mesure et des options de personnalisation.
Crédit : AllCovered Fashion
6. Construire des relations à long terme
En répondant aux besoins humains par ses créations, la marque bâtit une relation durable et de confiance avec ses consommateurs. Il s’agit là d’une des clés de la « slow fashion ».
7. Consommer local
Les marques qui emboitent le pas de la « slow fashion » ont à cœur l’utilisation de matériaux locaux, même si ces matériaux amènent parfois des contraintes en matière d’approvisionnement et de coûts. La plupart des produits pouvant s’afficher comme étant « faits au Canada », font partie intégrante de ce mouvement.
8. Maintenir la qualité et l’esthétisme
La base de la « slow fashion » se trouve dans l’achat de morceaux classiques et intemporels plutôt que de pièces de mode passagère. Les designers de la « slow fashion » se penchent donc sur l’utilisation de matériaux de qualité, afin d’assurer la longévité des vêtements. Ils désirent créer des pièces durables, sans jamais sacrifier leur charme. À ce chapitre, il n’y a pas meilleur exemple que les marques montréalaises Meemoza et Betina Lou pour illustrer ce point.
Crédit : Betina Lou
9. Viser la rentabilité
Pour les entreprises œuvrant dans la « slow fashion », il est important de miser sur des profits durables et d’augmenter leur visibilité sur le marché afin d’être compétitif face aux joueurs de la « fast fashion ». En s’assurant d’offrir un produit de qualité, confectionné dans le respect de l’humain et de l’environnement, les marques ne peuvent se permettre de vendre leurs produits à un coût dérisoire. Elles doivent donc en quelque sorte éduquer et convaincre les consommateurs d’acheter leurs produits plutôt que l’équivalent « cheap », ce qui n’est pas toujours facile!
10. Être conscient
Le mouvement de la « slow fashion » signifie avant tout de prendre des décisions éclairées basées sur ses valeurs personnelles et sur une conscience de l’autre et de l’environnement. La « slow fashion » exprime en premier lieu une volonté de la part du créateur d’agir de manière responsable, et se traduit ensuite en un désir du consommateur d’acheter intelligemment et consciemment.
Nous pouvons donc affirmer que la « slow fashion » est avant tout un mouvement et une école de pensée. C’est la représentation des balises concrètes que les marques se donnent afin d’évoluer dans le respect de l’environnement et de l’humain. Il s’agit aussi des valeurs enracinées en chacun de nous et qui nous amènent à réfléchir davantage sur l’impact global de nos décisions quotidiennes. Le concept de la « slow fashion » s’inspire du « slow food » : il s’applique à l’industrie de la mode, mais peut être transposé dans chacune des sphères entourant nos habitudes de consommation.
Crédit : Fashion Preview
Le mois d’avril est un mois particulièrement marquant pour l’industrie de la mode et le mouvement de la « slow fashion ». Avril est certes le mois du Jour de la Terre, mais plus important encore, le 24 avril marque la date de l’effondrement de l’usine Rana Plaza qui a causé la mort de 1138 personnes et de nombreux blessés en 2013. Pour que plus jamais un événement de la sorte ne se produise, l’association Fashion Revolution vous invite à prendre action tout au long de l’année, mais plus spécialement durant sa campagne qui aura lieu du 24 au 31 avril. Joignez-vous au mouvement et, par l’entremise de Twitter ou de Facebook, demandez aux entreprises : qui fabrique vos vêtements? #whomademyclothes
Embarquerez-vous dans le mouvement?
Couverture : Meemoza
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